28 septembre 2023
Château Belgrave, d’un marathon à un autre
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Une interview de Mathilde Chaillou, Responsable de chai au Château Belgrave et marathonienne.
– Bonjour Mathilde, et félicitations pour ton marathon ! C’est devenu une habitude, il me semble que tu avais également couru le Marathon du Médoc l’an passé. A l’occasion de ce nouveau millésime, nous avons voulu établir un parallèle entre la période clé des vendanges, et la préparation que requiert un marathon.
Pour moi les vendanges c’est comme les 20 premiers kilomètres. Il y a de l’intensité mais pour autant, on vient seulement de courir un semi-marathon et l’effort est loin d’être terminé.
Comment l’as-tu vécu cette année et quelles émotions cela te procure-t-il de courir pour défendre les couleurs de ton Château?
« On se donne à 100% sur un marathon mais à 200% lorsqu’il s’agit de courir pour son Château. C’est un vrai plaisir mais il faut assurer ! »
Comment t’es-tu préparée à cette course de fond ?
« Je me suis préparée avec un programme d’entraînement plus régulier que quand je cours en temps normal pour le plaisir. Préparer un marathon c’est alterner fractionné et plus grosses sorties. En ce qui me concerne, j’ai suivi une préparation accélérée en 12 semaines, même si habituellement on conseille plutôt de se préparer sur 6 mois. J’ai l’avantage de courir au moins trois fois par semaine en temps normal, hors vendanges bien sûr, où je privilégie le repos. »
En quoi cette préparation t’a-t-elle servie pour préparer tes vendanges 2023 ?
« Enchaîner marathon et vendanges, ça te permet de te préparer physiquement. Parce que les vendanges sont très éprouvantes, il faut préparer son corps à pouvoir encaisser une charge de travail et une forte intensité. Ça demande de l’endurance et de la constance. »
Les vendanges se traduisent en effet par une vraie résilience, comment gères-tu généralement l’effort sur cette période et en quoi cela te rappelle t’il tes 42 kilomètres ?
« Je cherche toujours à garder une perspective globale et à me rappeler ce que j’ai accompli. Prendre du recul est essentiel. Je me souviens que même si c’est une épreuve physique intense, c’est de courte durée. Quoi qu’il arrive, je franchirai la ligne d’arrivée. Ma mentalité positive est un atout, surtout lorsque je ressens des douleurs, des petites blessures, ou que la fatigue se fait sentir.
Pendant ma course, je me répète que je suis là par choix, par amour de ce que je fais, et je sais que cela en vaut la peine.»
Le marathon est une course bien solitaire quand les vendanges sont un véritable sport d’équipe, où se situe ta préférence ? Plutôt collective ou individuelle ?
« Pour moi cette question ne s’applique pas trop parce que je cours toujours en équipe. L’effort physique est solitaire mais l’enjeu est collectif. On a tous à un moment nos difficultés, nos baisses de motivation, mais l’équipe permet de franchir la ligne d’arrivée.
En vendanges c’est pareil, on a chacun nos jours où on a un peu moins dormi, mais collectivement on s’apporte. Tous ensemble on s’entraide, on se stimule, même avec quelques heures de sommeil en moins. »
Qui dit vendanges/marathon dit planification, comment s’organise la planification au château Belgrave ? Comment se décident les dates de vendanges ?
« On déguste régulièrement en équipe avec Bertrand, (Responsable du Château Belgrave), Frédéric (Directeur des Vins), Alex (Chef de culture), et notre consultant. On jauge les parcelles au regard de leur maturité, et on décide des dates de récolte. Une bonne communication entre le chai et la vigne, c’est clé. Quand on a décidé des parcelles à vendanger, on organise le chai en fonction et on met en place les plannings. »
Tous les raisins ne sont pas encore dans les cuves mais 2023 promet d’être un beau millésime, quelles sont tes premières impressions sur la récolte ?
« En effet, on commence juste les parcelles de cabernet-sauvignon à Belgrave. C’est un millésime très satisfaisant, on a la chance d’avoir la qualité et la quantité au rendez-vous. C’est de très bonne augure pour la suite. »
Dès le moment où on rentre de très beaux raisins, c’est à nous de tout faire pour que ça devienne un vin d’exception
La fin des vendanges approche, mais pour toi au chai c’est loin d’être la fin. A quel moment considèreras-tu que la course sera terminée ?
« Pour moi les vendanges c’est comme les 20 premiers kilomètres. Il y a de l’intensité mais pour autant, on vient seulement de courir un semi-marathon et l’effort est loin d’être terminé. Viennent ensuite les malos et les écoulages. Sur les 10 derniers kilomètres, c’est le mental qui prend le dessus. Finalement je considère que le marathon est vraiment terminé quand tout le vin est au frais dans nos barriques. La mise en barriques, c’est un peu « le jogging de décrassage », le lendemain on va toujours bouger un peu, malgré les courbatures. Et puis la suite, c’est de l’entretien. »
En quoi cela se rapporte-t-il à la sensation de réussite à la fin d’un marathon ?
« Passer la ligne d’arrivée c’est une super sensation, on a une sensation de fierté, et on remercie notre corps d’avoir survécu à ça. Finalement, on a déjà hâte d’être à l’année prochaine. Pour les vendanges c’est pareil. »
Merci pour ces parallèles inspirants entre les vendanges et la préparation au marathon, Mathilde. Nul doute que ton expérience et ton mental de sportive, apportent une perspective unique sur la création d’un vin extraordinaire et la persévérance nécessaire pour y parvenir.
Y-a-t-il une anecdote que tu aimerais partager ?
« Cette année nous sommes beaucoup de femmes dans l’équipe, c’est plutôt rare dans un chai et ça mérite d’être souligné. »
Une dernière question, seras-tu sur la ligne de départ l’année prochaine ?
« Oui bien sûr, une fois que tu sais que c’est possible, tu n’as plus qu’une envie, c’est de recommencer. Il y a un tel engouement, une telle ambiance avec les équipes et les supporters sur la route, que tu te sens portée. »
Il y a un tel engouement, tu te sens portée.
